Marketing sans cookies: les stratégies qui marchent Des solutions pour un tracking sans cookies et une personnalisation efficace
Les cookies de tiers disparaissent peu à peu, et avec eux une méthode éprouvée de publicité en ligne hautement personnalisée. Comment parvenir à mettre en place une publicité pertinente à l’ère post-cookies? Quatre stratégies pour un marketing sans cookies.

Bea et Beni ont jusqu’à présent beaucoup misé sur la publicité en ligne personnalisée: leur agence de voyage a diffusé à des clientes et clients potentiels, sur divers sites web, des publicités pour des voyages à forfait qui, selon leur comportement de navigation antérieur, correspondaient à leurs intérêts personnels. Mais ils doivent maintenant penser autrement et chercher une nouvelle stratégie pour la publicité en ligne. En effet, les données nécessaires à la diffusion personnalisée de la publicité ne sont plus disponibles. Elles étaient générées par ce que l’on appelle des cookies de tiers. Depuis que certains navigateurs bloquent ces cookies, la publicité en ligne est entrée dans une nouvelle ère – l’ère post-cookies.
Les cookies sont des fichiers texte composés de chiffres et de lettres qui sont générés par des serveurs web et enregistrés dans le navigateur. Ils confèrent une identité unique à chaque utilisatrice et utilisateur lors de la première visite d’un site web donné. Lors des visites suivantes, les données générées par les cookies sont renvoyées par le navigateur au serveur web. Cela permet par exemple d’afficher immédiatement le texte web dans la langue choisie lors de la dernière visite. Et pour la publicité en ligne, il est possible d’établir un profil du comportement de navigation à l’aide de cookies.
Cookies internes
Ces cookies sont enregistrés par le domaine du site web visité et permettent des fonctions pratiques. Ils servent par exemple à afficher le site web avec les paramètres préférés ou, dans les boutiques en ligne, à enregistrer les informations relatives au panier. Lorsqu’une cliente visite la plateforme de réservation de Bea et Beni, elle y est reconnue – mais pas sur plusieurs domaines. Seule la ou le propriétaire du site web a donc accès aux données générées. Les cookies internes continueront d’être pris en charge par tous les navigateurs. La publicité en ligne ne devra donc à l’avenir pas renoncer à tous les cookies, mais uniquement aux cookies de tiers.
Cookies de tiers
Ils ne sont pas enregistrés par le site web visité, mais par le domaine d’un fournisseur tiers. Si un contenu externe de ce fournisseur est intégré au site web visité, par exemple une publicité sur écran, le fournisseur peut placer un cookie. Le navigateur enregistre alors le cookie pour ce domaine externe. Ainsi, les utilisatrices et utilisateurs peuvent non seulement être identifiés et suivis sur ce site web, mais ils sont également reconnus sur d’autres sites web auxquels des contenus du même fournisseur sont intégrés.
Les données obtenues à l’aide de cookies de tiers permettent alors de générer des profils de mouvement et d’intérêt, la base du ciblage et du reciblage. Pendant longtemps, les cookies de tiers ont donc été à la base de la publicité en ligne. Les fournisseurs tiers ont consolidé les données tierces générées par leurs cookies, ont ainsi créé des profils d’utilisateur et les ont proposés aux annonceurs publicitaires.
Changement de paradigme en matière de protection des données
Le fait que les cookies de tiers soient devenus obsolètes s’explique en premier lieu par une prise de conscience accrue de la protection des données et par le renforcement des lois sur la protection des données. Suivre secrètement les utilisatrices et utilisateurs sur plusieurs sites web n’est plus considéré comme légitime. Seuls les cookies nécessaires à l’affichage d’un site web pour des raisons techniques sont encore autorisés sans signalement.
Ce changement de paradigme a incité deux exploitants de navigateurs populaires à prendre une mesure d’envergure: les deux navigateurs Safari d’Apple et Firefox de Mozilla bloquent les cookies de tiers par défaut. Microsoft prépare également cette étape pour son navigateur Edge. De son côté, Google a d’abord annoncé la fin des cookies pour le navigateur Chrome, mais l’a repoussée à plusieurs reprises avant de la mettre en suspens pour le moment. Mais cela ne change pas grand-chose à la perte d’importance des cookies de tiers, car elle a deux autres raisons:
- Beaucoup d’utilisatrices et d’utilisateurs protègent désormais eux-mêmes activement leur vie privée sur Internet. Ils utilisent des navigateurs respectueux de la protection des données, suppriment régulièrement tous les cookies, chiffrent leur trafic Internet et leur adresse IP avec des solutions VPN (Virtual Private Network) ou utilisent des bloqueurs de tracking.
- Une part de plus en plus importante du trafic Internet s’effectue via des appareils mobiles. Si ces derniers permettent certes l’utilisation de cookies de tiers, d’autres méthodes de tracking y sont plus courantes, en particulier dans les applications.
Les cookies de tiers fonctionnent également sur les smartphones et les tablettes. Lorsque les utilisatrices et utilisateurs visitent un site web via un navigateur, des cookies de tiers peuvent être enregistrés, à condition que le navigateur utilisé le permette encore. «En principe, les cookies peuvent également être utilisés dans les applications», explique Buster Grunau, Senior Cross-Channel Media Strategist au sein de l’agence e-dialog. «Lors de l’installation d’une application, les utilisateurs doivent toutefois accepter le tracking. Sur les appareils utilisant iOS comme système d’exploitation, les cookies sont même bloqués par défaut.» C’est aussi pour cette raison que le numéro d’identification dont dispose chaque appareil est plus important pour la diffusion de publicités personnalisées sur les téléphones portables. Il est toutefois possible de désactiver le tracking à l’aide de cet identifiant publicitaire.
De nombreuses entreprises ne sont pas encore prêtes
Les données de tiers manquent aux annonceurs publicitaires comme Bea et Beni dans l’ère post-cookies. Comme leur publicité ne s’adresse plus aux utilisatrices et utilisateurs de manière aussi personnalisée, leur efficacité diminue. Parallèlement, le plafonnement de la fréquence, c’est à dire la limitation délibérée du nombre maximal de fois qu’une personne peut voir la publicité de l’agence de voyage afin d’éviter toute sollicitation excessive, devient plus difficile.
Bien que ces conséquences de la disparition progressive des cookies de tiers se dessinent depuis un certain temps, de nombreuses entreprises ne se sont pas encore suffisamment adaptées. C’est ce que montre notamment l’édition 2024 de la série d’études Digital Dialog Insights, publiée chaque année par la Hochschule der Medien de Stuttgart en collaboration avec la société de marketing United Internet Dialog. Sur les 120 spécialistes en ligne interrogés, issus d’entreprises de production, de commerce et de services, seuls 11% à peine affirment que les entreprises de leur secteur sont déjà prêtes à affronter l’ère post-cookies. Et même 8% seulement estiment que les entreprises investissent suffisamment dans cette préparation.
En parallèle, l’étude montre clairement que malgré cette nouvelle situation, les entreprises veulent continuer à miser sur les avantages de la publicité en ligne ciblée. Seules 13% des personnes interrogées pensent que les entreprises renonceront de plus en plus au ciblage. Et 14% seulement sont d’avis que la fin des cookies de tiers entraînera un transfert de budget de la publicité en ligne vers la publicité hors ligne.
Quatre stratégies pour un marketing sans cookies
Il n’est plus possible de stopper cette évolution vers le marketing sans cookies: tôt ou tard, les entreprises devront dire adieu aux cookies de tiers. De nouvelles stratégies pour la publicité en ligne personnalisée et le ciblage sont donc nécessaires dans l’ère post-cookies. Fort heureusement, plusieurs s’offrent à nous. Un élément commun à la plupart de ces solutions: les données de première main – des données propres à l’entreprise qui sont collectées avec le consentement des utilisatrices et utilisateurs. Elles sont devenues la nouvelle norme d’or pour la publicité en ligne. Comme les données de première main sont collectées par l’entreprise elle-même, elles sont plus correctes et plus actuelles que les données de fournisseurs tiers obtenues avec des cookies de tiers. Cependant, les annonceurs ne peuvent pas personnaliser la publicité en dehors de leur propre site web avec des données de première main. Pour cela, ils ont besoin de technologies supplémentaires.
Pour collecter des données de première main, le propre site web et la boutique en ligne deviennent encore plus importants. En effet, il est ici possible de continuer à suivre, mesurer et analyser le comportement des clientes et clients existants et potentiels. En outre, le propre environnement en ligne est le bon endroit pour des entrepreneurs comme Bea et Beni pour générer des conversions et des leads de qualité et obtenir le consentement (Consent) pour l’utilisation de données de première main grâce à une gestion des préférences conviviale. De plus, les entreprises devraient investir dans une plateforme de données clientèle (CDP), car c’est là que toutes les données sont rassemblées et rendues utilisables.
Si les entreprises utilisent de plus en plus de données de première main et souhaitent continuer à diffuser des publicités personnalisées, il est recommandé de proposer une gestion des consentements conviviale. Cette gestion des préférences permet aux utilisatrices et aux utilisateurs de décider activement de la génération, de l’utilisation et du partage des données utilisateurs, de consulter à tout moment les autorisations qu’ils ont données (Consent) et de les adapter ou de les révoquer facilement.
Qu’est-ce qui caractérise une gestion des préférences conviviale? «Celle-ci doit être simple, claire et stimulante», explique Ursula Uttinger, experte en protection des données et enseignante à la Haute école spécialisée de Lucerne – Informatique: «En quelques mots clairs, les utilisatrices et utilisateurs doivent connaître les différentes options d’utilisation des données afin de pouvoir prendre leurs décisions en toute autonomie. En outre, ils attendent une contrepartie intéressante pour accepter l’utilisation de leurs données. Il peut s’agir d’une réduction, d’un bon achat ou d’un concours avec des prix intéressants. Si l’incitation est bonne, le taux de consentement augmente considérablement.»
Sur le plan technique, une stratégie publicitaire basée sur les données de première main se fonde sur une plateforme permettant de rassembler, de consolider et de mettre à jour les données: une plateforme de données clientèle (CDP). Elle permet d’utiliser des données de première main provenant de différentes sources. «Il est ainsi possible de souder des points de données très différents en un seul profil», explique Buster Grunau d’e-dialog. «Dans le meilleur des cas, les entreprises relient leur CDP à leur système CRM afin de combiner les avantages des deux plateformes: la CDP est un outil de marketing, le système CRM un outil de vente. Avec la CDP, les données CRM générées par l’équipe de vente peuvent être utilisées pour l’activation marketing de leads ou de clients existants.»
Stratégie 1: Personnalisation avec le Data Matching
Dans le cas de la personnalisation avec le Data Matching, la publicité est diffusée en fonction des caractéristiques et des modèles de comportement de tout un groupe de personnes (cluster). Au lieu de suivre le comportement de personnes individuelles, le ciblage se fait sur la base d’informations agrégées. «Pour ce faire, des données de première main provenant de différentes sources sont «couplées», c’est-à-dire fusionnées, et donc enrichies», explique Larissa Eisele, Managing Partner au sein de l’agence de marketing numérique Your Sidekicks AG. «La pratique courante, par exemple pour les réservations directes auprès des grands groupes de médias privés (éditeurs), est ce que l’on appelle les Data Clean Rooms. Plusieurs annonceurs publicitaires et éventuellement aussi des éditeurs y placent leurs données sous forme pseudonymisée ou anonymisée. Les Data Clean Rooms constituent un environnement numérique protégé permettant d’analyser les données en toute sécurité et dans le respect de la protection des données.»
Les algorithmes «look alike» forment des segments de groupes cibles individuels à partir des données couplées et identifient les caractéristiques et les modèles de comportement significatifs de ces groupes. Les personnes affectées à un cluster ne voient que les publicités qui correspondent aux caractéristiques du groupe. Si, en plus des entreprises publicitaires, plusieurs éditeurs sont connectés à une Data Clean Room, les annonceurs peuvent cibler les segments d’audience identifiés sur différentes plateformes.
Avantages:
- Enrichissement des données de plusieurs partenaires dans le respect de la protection des données
- Des cas d’utilisation plus complexes grâce à l’enrichissement
- Possibilité de personnalisation précise
Inconvénients:
- Nécessite d’être prêt à fournir ses propres données de première main
- Coûts élevés
Avec la Privacy Sandbox, Google a lancé un ensemble de technologies et d’outils permettant un tracking sans cookies et une publicité en ligne ciblée mais conforme à la protection des données. La diffusion ne se fait plus en fonction de chaque utilisatrice et utilisateur. Au lieu de cela, les utilisatrices et utilisateurs sont rassemblés sous forme pseudonymisée dans des groupes présentant des caractéristiques et intérêts similaires. L’évaluation de Larissa Eisele: «Google ne pouvait pas se permettre de ne pas proposer de solution correspondant à l’ère post-cookies. Certains outils comme ‹Topics› pour le ciblage contextuel (voir ci-dessous) sont passionnants. Mais on ne sait pas encore dans quelle mesure la Privacy Sandbox s’imposera.»
Stratégie 2: Server Side Tracking
Cette stratégie permet de générer des données sur les interactions telles que les pages consultées, les clics ou les abandons, même sans l’utilisation de cookies. En effet, les données collectées ne sont plus enregistrées dans le navigateur (Client Side Tracking), mais directement sur le serveur web. Celui-ci communique via des interfaces avec les serveurs des prestataires de publicité et des plateformes, et leur fournit les données sous forme anonymisée. «Les données sont souvent utilisées pour des campagnes sur les plateformes des médias sociaux», explique Larissa Eisele. «Les objectifs de la campagne et le ciblage peuvent y être facilement paramétrés. Sur la base des données transmises, la publicité est ensuite diffusée à des groupes de personnes intéressées.»
Avantages:
- Grand volume de données et haut niveau de qualité des données
- Contrôle sur les données transmises
- Répond à des exigences élevées en matière de protection et de sécurité des données
Inconvénient:
- Implémentation complexe d’interfaces, beaucoup d’expertise technique nécessaire
- Coûts élevés pour une solution individuelle
Stratégie 3: Identity Based Tracking
Dans cette approche, les utilisatrices et utilisateurs s’identifient consciemment en se connectant sur les plateformes et les sites web qu’ils utilisent. L’identification univoque sur tous les canaux et appareils se fait par exemple par l’adresse e-mail. L’Identity Based Tracking permet de collecter différentes données pour chaque utilisatrice ou utilisateur: par exemple sur l’utilisation des médias, les pages et les produits consultés, les clics effectués et les achats. Ces données collectées permettent de diffuser des contenus ou des publicités personnalisées. Par un opt-in, les utilisatrices et utilisateurs ont donné leur accord pour la génération et l’utilisation des données. Grâce à des coopérations, les éditeurs peuvent veiller à ce que le tracking et les diffusions publicitaires soient possibles sur plusieurs plateformes et sur un grand nombre de portails à forte audience. «Cette stratégie fonctionne surtout sur les petits marchés comme la Suisse, où les fournisseurs sont relativement peu nombreux», explique Buster Grunau.
Avantages:
- Haute qualité des données
- Possibilité de personnalisation précise
Inconvénients:
- Nécessite une identification consciente de l’utilisateur
- Moins intéressant pour les grands marchés publicitaires
En Suisse, plusieurs éditeurs et partenaires de commercialisation misent ensemble sur l’Identity Based Tracking afin de pouvoir contrer la puissance des acteurs internationaux sur le marché à l’ère post-cookies. Avec OneID, ils ont lancé une solution permettant un tracking des utilisateurs sur toutes les plateformes à l’aide d’identifiants uniformes. Les annonceurs publicitaires peuvent atteindre les utilisatrices et utilisateurs suisses via tous les éditeurs. La base de OneID est l’identification des utilisateurs à partir de l’adresse e-mail, s’ils approuvent son utilisation. Les adresses sont pseudonymisées et cryptées pour qu’elles ne puissent pas être traçables. OneID est disponible pour tous les exploitants suisses de sites web.
Stratégie 4: Ciblage contextuel
Le ciblage contextuel ne se concentre pas sur les utilisatrices et les utilisateurs individuels et leurs modèles de comportement, mais sur le contenu des pages web consultées. Les technologies modernes analysent à cet effet le contexte afin de placer des annonces publicitaires de manière ciblée dans un environnement thématiquement adapté. Le ciblage contextuel est possible aussi bien sur les portails médias et spécialisés que sur les médias sociaux comme TikTok ou Instagram. Par exemple, la publicité pour un voyage à forfait de Bea et Beni dans la région concernée peut apparaître à côté du contenu sur les destinations de voyage. Cette approche est efficace, car les annonces sont visibles au moment précis où les personnes ciblées s’intéressent au sujet en question. Cela augmente également l’acceptation de la publicité. Autre avantage: les clientes et clients potentiels peuvent être contactés plus tôt dans leur customer journey. En effet, alors que les approches basées sur les cookies s’intéressent à des profils d’utilisateurs connus, le ciblage contextuel atteint des personnes qui collectent leurs premières informations sur un sujet.
Avantages:
- Meilleure acceptation de la publicité au bon moment et pertinence thématique
- Démarchage rapide des personne intéressées
- Garantie complète de la protection des données
- Positif pour la diversité des médias: les portails et blogs spécialisés deviennent plus intéressants pour la publicité payante
Inconvénient:
- Une personnalisation moins précise que dans d’autres stratégies
En conclusion, voici ce que les entreprises devraient faire dès maintenant
L’ère post-cookies entraîne un changement de paradigme: les entreprises publicitaires doivent abandonner l’idée de pouvoir tout suivre dans le marketing à l’avenir. Mais d’autres méthodes et technologies leur permettent de garder une personnalisation suffisamment forte pour faire de la publicité de manière efficace tout en respectant la protection des données.
La stratégie qui convient le mieux à une entreprise, ou la combinaison de ces stratégies, dépend de sa situation de départ. C’est pourquoi Buster Grunau d’e-dialog recommande aux annonceurs publicitaires de commencer par une analyse: «Évaluez dans quelle mesure votre entreprise est affectée par l’arrêt des cookies et, par conséquent, l’ampleur des changements à apporter à votre publicité pour continuer à atteindre vos objectifs. Après cette analyse, testez différentes approches pour trouver celle qui vous convient.»